Où en est la lutte contre la précarité menstruelle à Lyon ?

Où en est la lutte contre la précarité menstruelle à Lyon ?
Ce serait 2 millions de femmes en France qui souffriraient de cette situation.

La période de la Covid-19 a fait naître de nombreuses actions à Lyon.

Au milieu du mois de juin, le Conseil Villeurbannais de la Jeunesse a inauguré une boîte de protections hygiéniques accessible gratuitement dans leurs toilettes pour les collégiennes, lycéennes et étudiantes. Tous les ans, les jeunes membres de cette organisation municipale se répartissent plusieurs projets sur lesquels travailler durant une année. Pour 2022-2023, neuf d’entre eux âgés de 15 à 20 ans ont choisi de lutter contre la précarité menstruelle des jeunes femmes. "Ce sont des produits chers pour un phénomène aussi naturel que les règles", s’exaspère Alice, l’une des actrices du projet. 

Tout comme le CVJ, les pouvoirs publics locaux et les associations ont entamé une lutte plus intense contre la précarité menstruelle depuis la période de la COVID-19. "Avant les élections municipales de 2020, il n’y avait eu aucune action sur le sujet faite par la Ville de Lyon. Les conséquences du virus ont mis en lumière la précarité en France", explique Sandrine Runel, déléguée au Maire aux solidarités et à l’inclusion sociale. La vice-présidente de la Métropole déléguée à l’égalité homme femme et aux discriminations, Michèle Picard, ajoute : "Les étudiantes en difficulté pour s’approvisionner en protections hygiéniques pendant le confinement ont beaucoup joué dans la mise en lumière de la précarité menstruelle. Victimes de leur situation, elles ont relayé ce problème social et de santé publics sur les réseaux sociaux".

Depuis, plusieurs actions ont eu lieu. L’association spécialisée Règles Élémentaires développe ses collectes comme celles faites dans les magasins E.Leclerc de Lyon autour du 28 mai, journée mondiale de l'hygiène menstruelle depuis 2021. Et, elle aide de nombreux acteurs à organiser les leurs :  particuliers, entreprises ou encore pouvoirs publics. "Nous avons un rôle de transition entre les dons et les besoins", souligne Raphaëlle Pereira, membre de l’antenne lyonnaise. Les jeunes du CVJ ont par exemple pu bénéficier de leurs conseils.

Depuis 2021, la Métropole organise sa collecte annuelle, du 8 mars au 28 mai, en collaboration avec Règles Elémentaires. L’objectif est de remplir le plus de boîtes à dons possible. En 2022, il y a eu 11 points de collectes dans les mairies et 30 000 produits récoltés et en 2023, 36 points de collecte et 40 000 produits récoltés. 

La Ville de Lyon a aussi lancé sa récolte en 2021. Elle s’est également procuré des boîtes auprès de Règles Élémentaires et en a disposé dans chaque mairie d’arrondissement. Elle a récolté 20 000 produits en 2021. Les deux institutions reversent ensuite les dons aux associations qui en ont besoin tel que le Secours Populaire ou encore GAELIS, une association de solidarité étudiante. 

Des boîtes gratuites dans les établissements scolaires

En plus d’alimenter ses épiceries solidaires avec ces collectes, GAELIS a œuvré pour que les facultés lyonnaises installent des boîtes de protections hygiéniques gratuites dans les établissements. Ce qui a été accepté lors de différents conseils des trois universités. 

Le collège est une période clé, c’est à ce moment-là que les premières règles arrivent en moyenne. C’est pourquoi la Métropole a également mis à dispositions ces boîtes gratuites dans 21 établissements sur près de 80. "C’est important que les collégiennes puissent s’approprier leur corps. Il faut qu’elles vivent cette période le mieux possible", explique Michèle Picard. 

Lutter contre la précarité menstruelle, c’est aussi lutter contre le tabou des règles

Tous les acteurs le disent. Le tabou autour des règles est un frein à la lutte contre la précarité menstruelle. "On estime que deux millions de femmes sont en situation de précarité menstruelle. Mais, ce n’est qu’une estimation. La plupart d’entre elles se cachent, donc on ne peut même pas évaluer les besoins précisément", explique la Vice-Présidente de la Métropole. 

En intervenant sur les collèges, la Métropole a un rôle fondamental dans le combat contre ce tabou. Et, elle en a bien conscience. Elle a notamment élaboré, en collaboration avec l’Académie de Lyon et des médecins, un livret d’une quinzaine de page intitulé. "Tout ce que tu as toujours voulu savoir sur les règles". Il a été distribué dans pratiquement tous les collèges de la Métropole, aux filles et aux garçons. 

Le combat avance, mais il y a encore beaucoup à faire. "Tant qu’il y aura de la précarité menstruelle, il faudra agir", c’est ce que pensent les acteurs lyonnais cités. La Métropole aimerait étendre les points d’accès gratuits à des protections hygiéniques dans le plus de collèges possible. La municipalité aimerait créer des boîtes gratuites dans des Maisons de la Métropole de Lyon. L’objectif serait également de collecter encore plus de protections hygiéniques. 

"Pourquoi ne pas aller vers une proposition de loi qui mène à la gratuité pour tous", suggère Sandrine Runel. Les élus de la Ville de Lyon commencent à se pencher sur la question. Un échange avec les députés lyonnais est prévu à la rentrée de septembre. 

Ces nombreux acteurs se mobilisent pour apporter à toutes les femmes l’hygiène et la dignité dont elles ont besoin. Mais, beaucoup d’efforts doivent encore être fournis pour que les pressions et les difficultés qui existent autour des règles disparaissent. Lyon semble être sur la bonne voie. 

M.P.

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